Elle perd ses économies sur la route migratoire, y rencontre de nombreuses difficultés et dédie son temps libre à sauver les jeunes tentés par le voyage irrégulier
Hassanatou MBAYE, 33 ans, est revenu du Maroc en mars 2019 avec l’assistance de l’OIM, au terme d’un séjour de 2 ans, marqué par plusieurs tentatives infructueuses de rallier la côte méditerranéenne de l’Espagne et par une perte financière de 37000000 gnf (3700 euros).
C’est en 2015, après le décès de sa mère et au terme d’un divorce douloureux, que l’envie de partir a commencé à germer chez Hassanatou.
« Je me suis retrouvé seule, sans emploi fixe, sans soutien et avec 2 jeunes enfants à nourrir. Face à l’immensité de ma détresse, je croyais n’avoir pas d’autres choix que de partir. C’est ainsi que j’ai décidé de me servir de 10000000 gnf (1000 euros) que mon frère m’avait confiés pour les rajouter à mes économies et ainsi, financer mon voyage, avec la ferme volonté de le rembourser une fois à destination », se souvient-elle.
Le 30 avril 2017, après s’être renseigné auprès de quelques connaissances et convaincue par ses échanges avec un réseau de passeurs, la mère de famille prend l’avion à Conakry avec un allé simple pour Casablanca avec pour seule compagnon son plus jeune enfant, âgé de 2 ans à l’époque. Pour elle, le Maroc ne représentait qu’une étape d’un périple qui la conduirait à terme en Espagne, « la terre du salut ». Mais c’était sans conter sur la tromperie de ses passeurs.
Peu de temps après avoir fouler le sol marocain, Hassanatou met le cap sur Rabat, où l’attendaient des membres du réseau de passeurs. Se croyant au bout du tunnel, elle baisse sa garde et confie à ses hôtes son argent, convaincue de leur sincérité. Mais elle ne tardera pas à déchanter, face aux fausses promesses des passeurs. « Les mois passaient et la date de mon voyage n’arrivait toujours pas. On me répétait sans cesse qu’il ne saurait tarder, mais je n’en voyait pas l’issue. C’est alors que j’ai voulu réclamer mon argent, mais ils n’en fallait pas plus pour qu’ils me menacent et qu’ils me chassent de leur base. Et n’ayant pas de titre de séjour, je ne pouvais pas me plaindre aux autorités », regrette-t-elle.
Au terme de cet épisode et face aux difficultés croissantes, Hassanatou choisi de renvoyer son bébé en Guinée, en le confiant à une amie rencontrée au Maroc qui se trouvait sur le chemin du retour. Sans domicile fixe, elle enchaine les petit boulots pour arrondir ses fins de mois, renouant par la même occasion avec la solitude et les problème financiers. « Pour moi, rentrer n’était pas une option envisageable car j’étais celle qui a dérobé l’argent de son frère et qui n’a même pas pu aller au bout de son projet. J’avais décidé d’y rester le temps qu’il faudrait pour trouver de quoi redorer mon image, à défaut de parvenir à atteindre l’Espagne ». La jeune migrante décroche alors un emploi dans un centre d’appel, mais n’y restera qu’un moi à cause explique-t-elle, « des conditions de travail très difficiles ». Elle travaille aussi comme femme de ménage pour plusieurs familles et comme servantes dans des restaurants, mais à chaque fois, son statut de personne en situation irrégulière refaisait surface.
Ne trouvant pas de solution pérenne, elle contacte la mission de l’OIM au Maroc en décembre 2018 pour demander une assistance au retour. C’est ainsi qu’elle rentre à Conakry 4 mois plus tard.
Aujourd’hui, Hassanatou s’occupe avec d’autre bénéficiaires de OIM Guinée, de l’entretien du centre de transit des migrants de retour et entend très prochainement avec l’appui de l’organisation, démarrer un commerce, en guise de projet de réintégration économique et social. Elle ambitionne en outre de consacrer son temps libre à la sensibilisation à travers le projet Migrants As Messengers, des jeunes guinéens animés par la volonté de partir de façon irrégulière.
OIM-Guinée